Les rats de Montsouris conduit Nestor Burma dans le quatorzième arrondissement, où voisinaient en 1955 îlots populaires le long des faisceaux de la gare Montparnasse et de la ligne de Petite ceinture et maisons bourgeoises nichées dans les rues pittoresques et les « villas » voisines du parc Montsouris et de la Cité universitaire. Un roman où le détective se promène en surface mais aussi dans le Paris souterrain puisque les catacombes et le réservoir de Montsouris y tiennent leur rôle. Entre cambrioleurs, arnaqueurs et maîtres-chanteurs, le détective de choc devra se casser la tête – au sens figuré, Les rats de Montsouris étant à ma connaissance un des rares romans où il ne se fait pas assommer – pour démêler le vrai du faux. Si les cadavres sont nombreux, les coupables ne sont pas toujours ceux que l’on imagine !
Outre des descriptions souvent lyriques d’un quartier qu’il connaissait bien, Léo Malet se laisse aller à des références artistiques et littéraires au surréalisme, mouvement auquel il fut longtemps lié. Il gardera de ces années une vision bien particulière de Paris : comme André Breton, il sait que la poésie de la ville ne réside pas dans les lieux mêmes, mais dans la manière de les appréhender.
"Il était un peu plus de quinze heures, lorsque j’avais arrêté ma bagnole place Jules-Hénaffe. (…) Je l’avais rangée le long du petit square, pelé comme un tondu, qui crève de consomption et de dépit de ne pouvoir rivaliser avec le Parc Montsouris proche. Le soleil donnait toute la gomme sur le Réservoir de Montsouris qui fournit en eau potable une partie de Paris et érige, avenue Reille, ses hauts talus couverts d’herbes folles. Comme s’il se fut agi de crus réputés (Lunain, Voulzie, Loing), le belvédère en céramique qui domine gaiment cet ouvrage d’aspect vaguement militaire était frappé sous sa corniche de son millésime : 1888."
Léo Mallet : Les rats de Montsouris © Bouquins, Robert Laffont, 1985
Roman policier classique pour les uns, un des premiers romans noirs pour Jean-Pierre Manchette, Les rats de Montsouris est une grande promenade dans un arrondissement qui a beaucoup changé. On y trouve encore le charme du parc et du réservoir du même nom avec son belvédère, les cafés de la place Denfert-Rochereau avec vue sur le lion de Belfort et l’entrée des catacombes. On pourra alors d’imaginer ce que pouvaient être il y a soixante ans la rue du Moulin de la Vierge, la rue Blottière, la Villa des camélias ou la rue du Change.
Son principal mérite - après lui nul n'a su le reproduire - est d'avoir prolongé l'univers poétique du Surréalisme par celui de la réalité du roman criminel.