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Jacky Toudic, sosie de Matthieu Kassovitz, vit d’arnaques à la fausse identité depuis plusieurs années. Revenu à Besançon, la ville de son enfance, pour s’occuper de sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer, il y retrouve quelques copains de jeunesse et rencontre, via Tinder, Zoé, une avocate fiscaliste esseulée. Encore quelques escroqueries et il espère bien finir sa vie sous les cocotiers… Mais Zoé à de l’imagination et pense qu’il faut voir plus grand.

Le coup de la fausse production cinématographique qu’elle imagine est relativement simple, du genre « prends l’oseille et tire-toi », et facile à monter. Cela traîne quand même un peu, le récit, à la première personne, paressant entre la préparation de l’affaire, des réflexions sur le monde tel qu’il va (pas très bien) et la société française (qui ne va pas mieux), des considérations sur la maladie de la mère de Jacky, la dégustation de crus de Bourgogne, etc. Cela permet à Jacky auteur/narrateur de flinguer à tout va : les bobos du 9e (« tellement cozy, tellement Paris »), les vieux babas qui écoutent du Graeme Allwright, la vie provinciale, les militants (de tous bords), France Culture (beaucoup), les black blocs (un peu), le complotisme tout comme le politiquement correct. La liste est longue…

« Berlin est leur capitale mondiale du bien-être. New York étant reléguée au rang des villes beaufs, puisqu’il faut prendre l’avion pour s’y rendre. Et l’avion, c’est mal. Eux, ils l’ont pris des centaines de fois, ils ont voyagé partout, parcouru le monde de long en large et ont un bilan Carbonne proche du taux de gamma-GT dans le sang de Charles Bukowski. Mais maintenant, ils se sont ressaisis, réveillés. Alors, ils te demandent à toi, petit gilet jaune, de ne pas trop te déplacer, de ne pas fumer, de te débarrasser de ta vieille Citroën Xantia diésel et de consommer local. »

Bien qu’un peu lent - il faut attendre plus de 150 pages avant que les choses ne s’emballent un peu - Kasso est un roman agréable à lire, d’un humour souvent féroce, parfois un peu chic et choc (tendance culture Canal Plus), avec des personnages qui voudraient être déjantés (l’apéro à la morgue) mais qui ne sont finalement que des types qui s’ennuient dans une ville de province. On retiendra quand même la figure de la mère, joyeusement iconoclaste, libre et imprévisible, et peut être un peu malhonnête. Comme quoi, les vieux, c’est plutôt sympa… Plus que les jeunes pleins d’idées foireuses en tout cas.

Ce qui pêche par contre c’est l’histoire elle-même : l’intrigue est minimaliste, les péripéties sont téléphonées, il n’y a pas un grand suspense et la conclusion est un peu facile. On sait que dans les œuvres, littéraires ou autres, qui tournent autour de l’escroquerie, tout se réduit le plus souvent à deux possibilités : soit l’escroc est un petit génie (Millenium, L’Arnaque) et on se délecte de le voir plumer les riches et les naïfs, soit il trouve finalement plus fort que lui (Au revoir là-haut) et l’on ressent comme une frustration. Aux lecteurs de juger. Mais certains seront un peu déçus en découvrant au fil des pages que Kasso, présenté comme « noir », est plutôt un agréable roman de formation, même si le « héros » approche de la cinquantaine.

Kasso, Paris, Le Seuil, coll. « Cadre noir), 2021.

Tag(s) : #Thriller
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