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Il est difficile de définir Shibumi de Trevanian, publié en 1979 et réédité en 2017 chez Gallmeister. Ce pourrait être un roman d’aéroport (autrefois on disait de gare) avec une classique intrigue d’espionnage des années 70 : la guerre froide s’est éloignée mais les bons, en l’occurrence le héros, luttent toujours contre les méchants, ici rien de moins qu’une multinationale secrète cherchant à dominer le monde. Les amateurs d’action et de suspense seront néanmoins déçus. Par contre il ne leur sera épargné aucun détail de la jeunesse chinoise et japonaise de Nicholaï Hel, tueur à gages professionnel amoureux du Pays basque et passionné de spéléologie.

Ce serait un vrai roman, dissimulé dans un genre populaire... J'ai fouillé dans mes souvenirs de jeunesse au Japon, je me suis créé écrivain pour Shibumi, un livre à la limite des conventions du roman d'espionnage « boum-boum », mais qui offre au lecteur un style viril d'excellence qui n'a rien à voir avec le style bravache à tous crins ou la violence. Il associe une bonne intrigue à une philosophie de la vie et il a été tout de suite un succès international. Entretien de Trevanian avec la journaliste Judy Quinn, du Publishers' Monthly

Retiré dans son château d’Etchebar en Haute-Soule, Hel, pour défendre son honneur et ses amis, va entrer[] dans une lutte à mort contre la Mother Company, organisation mondiale réunissant les principales compagnies pétrolières et les producteurs d’énergie et dont le patriotisme se résume au seul profit. Mais nous ne sommes ni dans James Bond ni dans SAS et les scènes d’action se limitent à la stricte nécessité de la crédibilité de l’intrigue. Une grande place est par contre donnée aux explorations des gouffres de la région, au climat et aux vents pyrénéens, aux dictons basques, aux bienfaits de la méditation ou à l’art subtil du jeu de go.

Antihéros, Nicholaï Hel est un homme libre, ni oriental et ni occidental mais les deux à la fois, un samouraï aux mains nues contre les puissants, doublé d'un misanthrope dont la causticité n’épargne personne : les Américains sont ineptes, sans culture et « vendent leur idéologie démocratique comme des colporteurs » ; les Français sont « un peuple qui allie une dévotion aveugle à l’argent avec la poursuite d’une gloire imaginaire » ; les Anglais sont exaltés et les Italiens incompétents! Rares sont ceux (les Basques peut-être) qui trouvent assez grâce à ses yeux pour ne pas se trouver inclus dans sa théorie de la tyrannie des médiocres.

Cela a toujours été ainsi. A travers toute l’histoire, les marchands sont restés à l’abri derrière les murs de leurs villes, tandis que les chevaliers allaient se battre pour les défendre, en échange de quoi les marchands ont toujours courbé l’échine et… léché les bottes. On ne peut pas leur en vouloir. Ils n’ont pas le sens inné du courage. Qui plus est, vous ne pouvez mettre votre courage en banque. © Editions Gallmeister, 2017

De Tardets à Etchebar en passant par le Pic d’Ohry et la forêt d’Irraty, nous sommes loin du polar urbain, et d’ailleurs Hel n’aime pas les villes. Cet étrange roman, rempli d’informations détaillées et vérifiées, parfois déjanté, ne laisse pas indifférent. Tout comme les autres romans de Trevanian (Rodney William Whitaker, 1931-2005), qui entraînent le lecteur dans les rues de Montréal (The main) mais aussi dans le monde de l’horreur (L’été de Katya) ou du western (Incident à Twenty-Mile).

Tag(s) : #Pays basque
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